Droits de douane : le Canada et le Mexique resserrent leurs rangs face à la stratégie protectionniste de Trump

À l’approche du réexamen de l’Accord États-Unis–Mexique–Canada (USMCA, aussi appelé ACEUM), prévu l’an prochain, Ottawa et Mexico affichent une volonté claire : parler d’une seule voix pour rééquilibrer les termes d’un partenariat mis sous tension par Donald Trump. La présidente mexicaine Claudia Sheinbaum et le Premier ministre canadien Mark Carney se sont rencontrés à Mexico afin d’élaborer une stratégie commune face aux velléités protectionnistes de Washington.

Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a durci le ton vis-à-vis de ses voisins. De lourds droits de douane frappent déjà l’acier, l’aluminium, les automobiles et certains produits agricoles, malgré les exemptions prévues par l’USMCA. Avec des tarifs atteignant jusqu’à 35 % pour le Canada et 25 % pour le Mexique, ces mesures affaiblissent la compétitivité des industries locales.

Sheinbaum et Carney entendent donc présenter un front uni pour convaincre Washington que la prospérité de l’Amérique du Nord repose sur une intégration équilibrée, et non sur des barrières tarifaires unilatérales. « Nous sommes plus forts ensemble », a résumé le chef du gouvernement canadien, appelant à renforcer l’esprit de coopération trilatérale.

Successeur de l’ALENA, l’USMCA constitue le socle des échanges nord-américains depuis 2020. Il est vital pour les deux partenaires : près de 80 % des exportations mexicaines et 75 % des exportations canadiennes prennent la direction des États-Unis.

Pourtant, Donald Trump pousse à renégocier l’accord dans un sens plus favorable aux industriels américains.

Au-delà de l’économie, la Maison-Blanche lie désormais les concessions tarifaires à des enjeux politiques sensibles, tels que la lutte contre l’immigration illégale ou le narcotrafic. Une conditionnalité qui crispe Ottawa comme Mexico, et qui menace la stabilité des chaînes de valeur régionales.

La rencontre à Mexico visait également à combler un déséquilibre : si les échanges de marchandises entre le Mexique et les États-Unis ont atteint 763 milliards de dollars en 2024 (762 milliards pour le Canada et les États-Unis), le commerce bilatéral Canada-Mexique plafonne à 31,8 milliards.

Conscients de cette faiblesse, Sheinbaum et Carney ont annoncé un plan d’action Canada-Mexique pour stimuler les investissements et fluidifier les échanges en s’appuyant davantage sur leurs ports respectifs. L’objectif : réduire la dépendance logistique aux infrastructures américaines et créer de nouvelles routes commerciales.

Quels enjeux pour les entreprises ?

Pour les industriels de l’automobile, de l’acier ou de l’agroalimentaire, les prochains mois seront déterminants. Le maintien de tarifs punitifs pèserait sur la compétitivité des exportateurs, tout en renchérissant les coûts pour les importateurs américains. À l’inverse, une renégociation plus équitable ouvrirait la voie à une meilleure prévisibilité des flux, un critère crucial pour sécuriser les chaînes d’approvisionnement.

Le bras de fer qui s’annonce dépasse la simple question des droits de douane : il s’agit d’un test grandeur nature pour l’avenir de l’intégration économique en Amérique du Nord. En resserrant leurs liens, le Canada et le Mexique envoient un message clair : seule une coopération équilibrée permettra à la région de rester compétitive face à l’Europe et à l’Asie.